Le décollage du paiement mobile se fait toujours attendre
Annoncées comme une révolution, les solutions utilisant le téléphone portable tardent à s’imposer. Mais la donne pourrait bientôt changer…
Les grandes manoeuvres auraient-elles commencé ? Pour acheter sur internet depuis leur smartphone, les mobinautes disposent déjà de toute une palette de solutions. Le Crédit Agricole avec Kwixo, le groupe BPCE avec S-Money, et les opérateurs de téléphonie mobile Orange, SFR et Bouygues avec Buyster ont été les premiers à se positionner sur ce marché aux côtés de pure players comme LemonWay. Et ce n’est pas fini puisque BNP Paribas, Société Générale et La Banque Postale plancheraient, elles aussi, sur le lancement de leur propre portefeuille électronique. Pour tirer son épingle du jeu sur un marché qui vient d’être revu à la baisse par le cabinet Gartner, mais qui devrait tout de même avoisiner les 721 milliards de dollars de transactions dans le monde en 2017, un acteur comme Buyster a mis en place une stratégie multicanal. « Contrairement à certains concurrents qui ne visent que le paiement sur mobile, explique Sébastien Trova, directeur commercial de Buyster, nous nous positionnons comme un moyen de paiement à distance présent sur l’ensemble des canaux (ordinateurs, tablettes et smartphones), tout en apportant une vraie réponse en termes de simplicité et de sécurité. »
Lorsqu’ils désirent régler un achat sur un site web mobile, les membres Buyster, qui ont au préalable communiqué leur numéro de téléphone portable et leurs coordonnées bancaires, n’ont en effet qu’à saisir le code confidentiel Buyster à six chiffres pour valider leur achat. « Et comme nous assurons aussi l’authentification du porteur du mobile à travers les réseaux des trois opérateurs de téléphonie, nous garantissons un niveau de sécurité qui n’a rien à envier à celui de 3D Secure », assure Sébastien Trova.
Innovation et sensibilisation
Malgré la simplicité de leur ergonomie et des dispositifs de sécurité qui permettent de ne plus faire circuler les coordonnées de la carte bancaire au moment de l’achat, ces solutions ont du mal à s’imposer, comme le constate Bruno Joanides, directeur des activités Nouveaux services et moyens de paiement chez Syrtals. « Lorsqu’elles ont été lancées il y a un an et demi, les éditeurs ont communiqué uniquement sur le moyen de paiement. Cela n’a pas suffi pour susciter l’adhésion du grand public, les Français restant très attachés à leurs moyens de paiement traditionnels. Et comme très peu de commerçants avaient à cette époque ouvert des sites marchands mobiles avec ces nouveaux moyens de paiement, le décollage espéré n’a pas eu lieu. »
Mais ce retard à l’allumage n’inquiète pas pour autant les principaux concernés. « Nous sommes toujours dans une phase d’innovation et de sensibilisation auprès du grand public, avec des courbes de progression qui deviennent intéressantes après un démarrage un peu lent, confie Christophe Nepveux, directeur général de Fia-Net Europe, la filiale du Crédit Agricole qui commercialise Kwixo. Et puis côté e-commerçants, l’accueil est plutôt bon car les membres Kwixo se distinguent par un panier moyen deux fois plus important que celui de la Fevad*. » Chez Buyster, les premiers résultats se font aussi sentir. « 25 % des paiements enregistrés sur notre plateforme passent d’ores et déjà via le mobile, observe Sébastien Trova. Cela montre qu’il y a un début de maturité chez les mobinautes, même s’il y a encore besoin d’expliquer et de rassurer. Et quand on voit que de plus en plus d’e-commerçants investissent dans des sites marchands mobiles, et que les mobinautes n’hésitent plus à acheter depuis leur smartphone lorsqu’ils sont confortablement installés dans leur canapé à la maison, tout cela nous laisse entrevoir de belles perspectives. »
Plus de frontières…
Un optimisme que partage Bruno Joanides. « Le tournant du paiement mobile est effectivement bien engagé chez tous les grands acteurs de l’e-commerce. On peut aussi penser que les grandes banques, qui vont bientôt prendre position sur ce marché, contribueront à rassurer tout le monde. » L’évolution des habitudes de consommation pourrait aussi, selon lui, favoriser le développement du paiement sur le mobile. « Le phénomène pourrait même avoir une incidence sur les marchands de proximité qui devront établir une véritable stratégie sur internet pour espérer conserver leurs clients. Qui n’est pas allé dans un magasin pour regarder le prix d’un téléviseur et le comparer sur son mobile avec les tarifs proposés par des sites marchands ? Demain, il sera également possible de régler ses achats dans une boutique depuis son téléphone portable, sans passer par la caisse, conclut Bruno Joanides. Toutes ces évolutions contribueront à abolir les frontières entre paiement de proximité et paiement sur le mobile. »
*Le panier moyen des achats sur internet mesuré par la Fevad (Fédération e-commerce et vente à distance) était de 85 euros au premier trimestre 2013.
Publication de Bruno JOANIDES sur l’AGEFI HEBDO de juin 2013.
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