1 – Quelle est votre vision du marché ?
Dans un marché où les GAFA ont posé de nouveaux standards de relation client (immédiateté, simplicité, personnalisation) et où les nouveaux entrants ont une agilité naturelle en ce domaine, les métiers de l’assurance se retrouvent en position de faiblesse du fait de contacts avec les clients structurellement peu nombreux et assez éloignés de ce que l’on qualifie aujourd’hui de « moments d’enchantement ».
Nous assistons par ailleurs à une évolution sans précédent des usages (économie du partage, objets connectés) et des risques (omniprésence du numérique) mais avec des incertitudes fortes sur les horizons de prise d’effet réel.
Pour éclairer mon propos prenons simplement l’exemple de la voiture autonome. Les projections sont claires sur l’attrition du parc roulant du fait des restrictions dans les grands pôles urbains, du développement de l’auto-partage et plus généralement des nouvelles mobilités et de la prise de conscience progressive des problématiques environnementales. C’est un premier facteur de pression sur ce que l’on appelle « la masse assurable ». Il est assez prévisible et se mesure déjà. En revanche l’avènement d’un trafic routier auto-régulé par des voitures autonomes et communicantes entre elles l’est beaucoup moins alors que l’impact sur l’accidentologie serait majeur, ce qui est en soi est évidemment une excellente nouvelle mais non sans conséquence sur ce qui fonde notre existence même.
L’apparition de modes de consommation basés sur le partage des biens conduit aussi à une transformation partielle et progressive de nos marchés en les faisant basculer de l’individuel vers le collectif avec un risque d’intermédiation par des acteurs en capacité de fournir un service complet (package assurance, location et entretien).
Le marché se caractérise aussi par l’accentuation de risques existants et l’émergence de nouveaux risques. Citons en premier le lieu les conséquences du dérèglement climatique. Les événements considérés comme exceptionnels hier se multiplient aujourd’hui (tout récemment encore avec le violent épisode de grêle dans la Drôme) ce qui intensifie nos recherches en matière de services d’accompagnement et de prévention. Dans la catégorie des nouveaux risques la première place revient sans conteste à la cybercriminalité avec une demande de plus en plus forte de nos clients en termes là aussi d’assurance bien sûr mais aussi d’accompagnement et de services.
Enfin, il est utile de rappeler que la santé des marchés de l’assurance est étroitement liée à celle de l’économie dans son ensemble. Et aujourd’hui le contexte économique global reste incertain avec une croissance molle et des taux d’intérêts bas voire négatifs.
Au final, notre marché est donc exposé à de multiples pressions. Pour notre part, nous y voyons autant d’opportunités pour compléter notre proposition de valeur et innover encore et toujours ce qui est une marque de fabrique de Groupama depuis longtemps.
2 – Comment ce nouvel écosystème s’organise ?
Comme je l’esquissais à l’instant, Groupama est un groupe innovant avec des valeurs mutualistes fortes, très attentif à la qualité de la relation client, toujours en recherche d’une palette riche et différenciante de produits et de services commercialisés à travers ses différents réseaux et disposant pour cela de solides actifs industriels (filiales d’assistance, de protection juridique, réseaux de réparateurs pour l’automobile et l’habitation, réseaux de soins en dentaire, optique et audioprothèses, télésurveillance, etc.).
Concernant la relation client, nous avons toujours considéré qu’il ne fallait pas attendre que le client vienne à nous mais qu’il nous revenait d’aller au-devant de lui et de ses préoccupations. Cela passe pour nous par des contacts réguliers, riches de contenus, pertinents sur le moment, pas toujours mercantiles.
Et comme nous cherchons au final à faciliter la vie des clients nous enrichissons continuellement notre offre avec une palette de services toujours plus pertinente, bien packagée et donc simple d’accès pour nos clients.
Nous parlons désormais de mobilité pour nous adapter aux besoins du client dont les moyens de locomotion deviennent multiples : automobile en propre ou en auto-partage, NVEI (Nouveaux Véhicules Electriques Individuels), … De même nous poussons le concept de foyer connecté et sécurisé pour proposer une protection globale de l’habitation et de ses occupants avec la télésurveillance des biens et la téléassistance aux personnes. Il nous paraît important de valoriser ce rôle de l’assureur comme acteur de prévention des risques et créateur de confiance.
L’écosystème santé est crucial pour nous. Groupama est un assureur au cœur des territoires et ses clients sont parmi les plus concernés par la problématique des déserts médicaux. Nous avons très vite inscrit dans notre offre la téléconsultation mais nous voulons aller plus loin et étudions toutes les solutions possibles pour faciliter l’accès à des soins de qualité et favoriser le maintien à domicile dans des conditions économiques viables pour l’ensemble des parties.
Comme il est difficile d’évoquer tous les écosystèmes, je finirai par celui qui constitue les racines de Groupama à savoir l’agricole et qui a vu cette année, à l’occasion du Salon de l’Agriculture, le lancement de GARI, un agrégateur de services innovants et connectés pour simplifier la vie des agriculteurs et veiller sur leur exploitation. Lorsque j’évoquais notre volonté d’aller au-delà des produits d’assurance il n’y a pas de meilleur exemple !
Ce sont tous ces écosystèmes que nous animons avec une culture d’entreprise bien en phase et en interaction avec des partenaires externes de premier plan mais aussi des startups. Cette capacité d’ouverture vers l’extérieur et cette agilité pour nouer des partenariats se gagne par l’accomplissement de chantiers majeurs tant en termes d’organisation que de processus mais aussi et bien sûr autour de notre système d’information, une ressource clé de tout assureur, avec en particulier son APIsation.
3 – Quel est le rythme de l’évolution ?
Nous cherchons à toujours avoir un temps d’avance. Cela implique d’être attentif à tous les signaux faibles du marché et de rester innovant sans céder pour autant aux sirènes et aux effets de mode du tout digital. Comme je l’ai déjà dit, l’innovation est au cœur de l’ADN de Groupama et nous sommes peut-être trop discrets et modestes en la matière. Pour ne parler que de la mobilité par exemple, citons le fait que nous avons été les créateurs du concept de l’accident management avec CapsAuto et à proposer des services de prise en charge / remise du véhicule sur le lieu de domicile ou de bureau du client. Nous avons été aussi les premiers à lancer une formule de « pay as you drive », à innover sur l’inclusion des formules d’assistance en cas de panne, etc.
Par rapport aux purs produits d’assurance, l’innovation dans le monde des services est à la fois plus critique et nécessite une rapidité de mise en marché supérieure. Compte tenu de notre volonté d’accélérer dans le domaine des services nous devons donc veiller à ce que nos process d’innovation suivent.
En conclusion nous devons innover au plus près des clients, au plus près des équipes en contact avec ces derniers (commerciaux, téléconseillers, gestionnaires de sinistres), toujours plus vite, tous azimuts et en étant ouvert sur le monde extérieur.
C’est à la fois une nouvelle exigence et un formidable champ des possibles !