TRADE FINANCE 

Dominique-Fage-1074

Dominique FAGE

Directeur associé Syrtals

Trade Finance – sécuriser au juste prix

Acteur historique du commerce international et tiers de confiance, le banquier serait-il destiné à être remplacé par la technologie ? Certaines avancées le laissent à penser : acheteur et fournisseur sont toujours plus proches grâce au Web ; les processus de production sont plus sûrs grâce aux facilités de prototypage et aux mini séries ; la logistique de transport est sous traçabilité permanente.

Les risques du commerce international perdurent cependant et les événements récents l’illustrent bien : fragilité du flux physique de matières premières et de marchandises, avec le prix de l’énergie, les conflits, les embargos, les catastrophes sanitaires et climatiques ; fragilité du flux documentaire avec la désorganisation des États ; fragilité du flux financier avec son lot de sanctions, de défaillances ; sans oublier l’instabilité monétaire.

Pour les entreprises, maîtriser l’impact de ces risques sur leur situation financière est plus que jamais d’actualité, à condition que le coût de la sécurité reste compatible avec leur modèle économique.

Les acteurs du « Trade Finance » qui œuvrent en permanence à la réduction de leurs coûts l’ont bien compris. Les équipes d’experts en charge des contrôles documentaires, ressource rare, sont mutualisées, tout comme les équipes back-office chargées des nombreuses manipulations de documents. Des plateformes technologiques régionales, voire mondiales, permettent l’harmonisation des processus de gestion sur l’ensemble des géographies.

Ces efforts indispensables pour préserver l’attractivité des services semblent pourtant toujours en décalage avec l’évolution permanente des besoins des clients. En effet, les grands importateurs VS exportateurs par leurs relations commerciales solides et récurrentes fonctionnent de plus en plus en « open account ». Ils laissent les acteurs de la logistique gérer le risque sur le flux physique (assurance). Ils participent ainsi à la baisse du nombre des opérations sophistiquées du Trade Finance – crédit documentaire, remise documentaire – et, par conséquent, à l’augmentation du coût unitaire de ces services.

Les ETI et PME, nouveaux acteurs venus au commerce international grâce à la baisse du ticket d’entrée, ont souvent peu d’appétit pour un service financier perçu comme plus sophistiqué que l’échange commercial sous-jacent. Ils sont demandeurs de solutions de financement du cycle simples à piloter, proches de celles utilisées pour le domestique (affacturage par exemple).

Dans les faits, les solutions complexes, basées sur des obligations inscrites au contrat commercial contrôlées par des experts de la banque via des documents échangés tout au long de l’acheminement de la marchandise, sont utilisées pour les transactions de gros montant et non répétitives. Les très grands acteurs du Trade Finance seront probablement, à terme, les seuls à pouvoir préserver la marge sur cette activité historique, et ce, en partie grâce à d’autres prestations connexes plus rémunératrices (change, financement de projets…).

Pour bénéficier de l’essor du commerce international et capter les nouveaux clients, l’heure est plus que jamais à l’innovation et la simplification des offres financières.

Plusieurs évènements laissent entrevoir le possible avènement d’un écosystème Trade Finance commun réellement ouvert (par opposition aux tentatives historiques type Boléro…).

La Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International (CNUDCI) a produit en 2017 une loi type à l’attention des États pour l’usage de documents transférables électroniques, le prérequis à la dématérialisation totale du flux documentaire. La liste des pays en passe d’adapter leur droit selon les principes édictés par la CNUDCI s’allonge au fil des trimestres, prochainement le Royaume-Uni, après Singapour, et bientôt la France. Allemagne et États-Unis avaient un droit adapté.

Les acteurs du fret, les ports, les transporteurs ont, quant à eux, déjà largement dématérialisé le suivi d’un flux physique souvent plus rapide que le flux documentaire, alors que ce dernier conditionne le transfert de propriété et donc la bonne fin de l’échange commercial.

Tout cela prendra certes du temps, mais il est désormais indispensable d’intégrer lors de toute réflexion sur le devenir des offres, des métiers et des outils du Trade Finance l’utilisation des registres partagés, des API, de l’intelligence artificielle et des objets connectés ; avec, bien évidemment, l’accompagnement et l’expertise Syrtals.