Editorial
Le confinement, catalyseur de la dématérialisation
Après plusieurs mois à naviguer dans une crise sanitaire sans précédent, impossible de ne pas tirer les leçons d’une période si difficile, au niveau individuel comme collectif. Mais, même au cœur de la tempête, il me semble primordial de souligner la créativité des acteurs du secteur économique. Dans l’adversité, ils ont su réinventer leur activité, parfois même allant jusqu’à repousser les limites de leur sphère. Les restaurants se sont tournés vers la vente à emporter, les entreprises vers le télétravail, les commerces ont développé le service en drive… Prouvant ainsi une chose : face à des contraintes très lourdes, la dématérialisation a su émerger comme une solution durable, avec de nombreux bénéfices.
En décembre 2018 déjà, nous avions affirmé le pouvoir de la technologie comme puissant levier de la transition écologique. Deux années et une crise sanitaire plus tard, les données planétaires permettent enfin d’appuyer cette déclaration. Après deux mois de télétravail, nous constatons que les villes se sont dégagées, que le jour du dépassement a reculé… démontrant chaque jour un peu plus l’intérêt d’évoluer dans un monde beaucoup plus dématérialisé.
Grâce à ces constatations, nous avons désormais toutes les clés en main pour esquisser les contours d’un futur responsable, solidaire… et numérique ! Gardons notre capacité de fonctionner à distance, développons le télétravail, repensons l’espace physique du « bureau » … Voici là des opportunités inédites d’ouvrir un débat constructif sur un pilotage intelligent de la dématérialisation. De même, encourageons les restaurants et les commerces à poursuivre une activité mixte. Aidons-les à construire des réseaux multicanaux fluides, leur permettant de passer d’un monde à l’autre sans soucis. Et surtout, profitons de l’aspect spectaculaire de notre capacité d’adaptation pour la renforcer et pour ne pas diaboliser la dématérialisation, ne pas opposer la vente physique à la vente numérique, mais plutôt construire un lendemain ou ces deux modes de fonctionnement seraient complémentaires et solidaires.
Nous sommes tous responsables du monde que nous voulons esquisser pour demain. Faisons-en sorte qu’il soit durable, solidaire et inclusif.
Rubrique Paiements
Comment adapter le modèle des paiements à l’heure des crises sanitaires ?
Les crises sanitaires récurrentes dans l’histoire de l’humanité, telles des météorites, détruisent de nombreuses vies et économies, laissant sur leur passage son cortège de souffrances. Les croisades en leur temps ont transporté avec elles la lèpre et la peste, la découverte des Amériques, la rougeole, la variole, le typhus, et de simples rhumes décimèrent des peuples entiers. Leur diffusion est d’autant plus aisée qu’elle est portée par des microorganismes ou molécules invisibles. La vélocité des déplacements actuels permet en quelques heures de relier des continents, et a accéléré exponentiellement la propagation des épidémies. Si les échanges entre peuples contribuent au progrès économique et social de l’Humanité, toutefois les pandémies démontrent les limites et les contradictions des modèles actuels en vigueur. Et même si quelques grands du Net ou banques en ligne ont tiré leur épingle du jeu, il est temps de repenser et d’adapter les modalités de ces échanges pour assurer une cohésion sanitaire, écologique et économique.
Les paiements, maillon incontournable de l’économie, sont partie intégrante de ces modalités à adapter pour préserver les échanges et liens commerciaux, fondamentaux à la survie de l’Humanité. La gestion d’une crise passe principalement par cinq majeures : prévention, adaptation, information, collaboration et innovation. La prévention est la première arme à déployer, en dimensionnant les systèmes de paiement, pouvant basculer instantanément en mode mixte digital/proximité, complété par un dispositif renforcé de lutte contre les cyberattaques et la fraude. La société CERP a été victime récemment d’une fraude au fournisseur sur un montant de 6,6 M€ après une commande de masques et de gel. Ces mesures préventives devront faire cohabiter moyens de paiement traditionnels et solutions digitales, afin de limiter la fracture numérique et sociale. L’adaptation et l’information en cas de crise sont des armes indispensables, en déployant des parades aux espèces, chèques, saisie du code confidentiel sur les terminaux, tant pour les utilisateurs que les opérateurs. Les banques ont particulièrement été mobilisées accompagnant les entreprises et les particuliers pour maintenir la vie économique. Elles ont su déployer en urgence plusieurs mesures, notamment la levée des contrôles de délai sur les chèques circulants pour éviter leur rejet au-delà de six jours et l’adaptation du canal de distribution des cartes bancaires. Les banques ont appliqué les décrets gouvernementaux accordant des délais de paiement de cotisations, en annulant des flux de prélèvements déjà émis. Elles ont réorganisé les équipes et horaires d’ouverture des agences pour sécuriser leur accès et informer la clientèle sur leurs droits au niveau couverture des frais médicaux et d’annulation ou de rapatriement, et mise à niveau des assurances. La collaboration entre acteurs s’est révélée une arme efficiente. L’ensemble des acteurs de la monétique a relevé ce défi en permettant d’élever le plafond du sans contact à 50 € en moins de 15 jours via des scripts EMV. Des villes ont mis en place des réseaux de distribution en créant des plateformes web regroupant plusieurs commerçants de proximité. Des market places de confiance ont permis d’approvisionner de nombreuses entreprises.
L’innovation est aussi une arme essentielle dans une crise sanitaire, où les décisions et les actions doivent être prises rapidement sous contraintes. « Innover ou disparaître » comme le définit Olivier Laborde dans son livre, est plus que jamais une obligation en pandémie. Repenser, s’adapter, coopérer, se remettre en cause, s’ouvrir sont des éléments indispensables. Aujourd’hui, sur le marché des paiements, on trouve de nombreuses solutions innovantes, mais un tri s’impose dans la pléthore des solutions existantes qui brouille plus qu’elle ne répond aux besoins de la clientèle particulier ou professionnelle. Les échanges devront se montrer innovants, sachant déployer en un temps record un arsenal de mesures contrôlées, avec un niveau de qualité à repenser. La crise nous oblige à modéliser de bout en bout le cycle d’achat en un tout : de la mise en relation, en passant par le paiement et la livraison des biens et des produits par l’appui des acteurs locaux, le déploiement de drives. Ainsi, commerces de proximité, producteurs locaux ont plutôt bien passé la vague, voire ont vu leur chiffre d’affaires augmenter. Il faudra donc s’appuyer sur des market places de confiance, et proposer des kits clés en main omnicanal offrant site internet, site marchand multi modes de paiement, au parcours client facilitant les mesures de KYC, paiements mobiles et échelonnés, wallet et virement instantané permettant de s’affranchir des plafonds cartes. Pour les paiements de proximité, certes le sans contact répond partiellement à la mesure de distanciation, mais non suffisant, l’authentification par reconnaissance vocale sera une piste préférable à l’empreinte digitale. Google s’est lancé sur ce type de tests.
Un long chemin vers la digitalisation reste encore à parcourir, en France avant la pandémie, seulement 2,2 % des paiements étaient réalisés avec un mobile contre 35 % en Chine. Sans doute cette crise viendra modifier nos habitudes : notre planète transformée en matrice urbaine hyperconnectée gardera-t-elle cette structure ? Si les crises sanitaires génératrices de risques systémiques, covid-19 aujourd’hui ou grippe espagnole au siècle dernier, témoignent à leur façon des désordres d’une société devenue incontrôlable devant sa propre puissance, il est toujours temps de se reprendre et de corriger les biais. Pour parer à ces risques, l’innovation en matière de paiements collaboratifs et connectés, mais non déconnectés de la réalité, est l’un des piliers pour préserver l’équilibre économique, sanitaire et écologique. La fluidification des échanges par la digitalisation, l’authentification sans contact et vocale, la coopération avec les canaux de vente et de distribution seront des moteurs de cette transition, en privilégiant les acteurs locaux et les circuits courts. Les échanges, quelles que soient leurs formes, resteront car ils sont essentiels au progrès humain.
Rubrique Cash management
Le PGE : un beau challenge remporté par les banques et un nouveau regard sur le prêt de trésorerie aux microentreprises
Le 25 mars a été lancé le PGE, Prêt Garanti par l’État, pour aider les entreprises de toutes tailles et formes juridiques à faire face à la crise économique provoquée par le confinement. Le dispositif a été élargi le 8 mai à certaines sociétés civiles immobilières, aux entreprises en difficulté depuis le 1er janvier 2020 et aux « Jeunes entreprises innovantes ».
Le prêt peut représenter jusqu’à 3 mois de chiffre d’affaires 2019 (voire les trois meilleurs mois de l’année 2019 pour les PME du secteur tourisme) ou deux années de masse salariale pour les entreprises innovantes ou créées depuis le 1er janvier 2019. Sa durée maximum est de cinq ans ; aucun remboursement n’est exigé la première année.
Les entreprises le demandent à leur banque habituelle ou aux plateformes de crowdfunding/financement participatif.
À l’heure de ce que l’on peut espérer être un retour définitif à la normale, et 3 mois après le lancement, il nous a semblé utile de dresser le bilan de cette initiative, qui a mis en lumière l’importance et l’engagement des banques dans l’économie, plus particulièrement en période de crise.
Sur les 300 Md€ d’enveloppe, utilisables d’ici le 31 décembre 2020, la demande reçue est de 105 Md€ au 22 mai. Les dossiers continuent d’arriver à hauteur de 1,5 Md€ par jour, contre environ 2,5 ces dernières semaines. La demande pourrait atteindre au final 150 Md€, soit la moitié des 300 Md€provisionnés par l’État. Ce montant est considérable car supérieur à l’encours total des crédits de trésorerie des entreprises (237 Md€ de crédit de trésorerie à fin février 2020).
Au 22 mai, 82 Md€ ont été attribués à 450 000 entreprises, pour un montant moyen de 183 000 €.
Les banques n’ont pas chômé car 40 Md€ par mois de décaissement, c’est quatre fois le rythme normal de traitement des crédits de trésorerie… alors qu’une partie du personnel, dont tous les services administratifs, était en télétravail ! Bravo !
Les bénéficiaires du PGE sont essentiellement des TPE (autrement nommées « micro-entreprises »/MIC) entreprises occupant moins de 10 personnes, et ayant un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 Md€.
Ainsi 400 000 microentreprises ont emprunté 36 Md€ pour un montant moyen de 91 000 €. Pour les MIC ces 36 Md€ représentent un engagement considérable, qui se compare et s’ajoute aux 20 Md€d’encours de trésorerie à fin décembre 2019. Le PGE a donc triplé l’encours de crédit de trésorerie des MIC !
Le prêt de trésorerie ne représentait que 6 % des encours de crédit des MIC, les banques favorisant davantage les crédits d’investissement (47 % des encours) et d’immobilier (47 % également) sur cette cible, alors que sur l’ensemble des entreprises le crédit de trésorerie pèse 26 % du total des encours.
Après cette opération, on peut dire que le crédit de trésorerie est entré enfin au service des MIC. On peut espérer qu’il restera à bon niveau désormais car c’est un instrument important de développement des petites entreprises.
Les plans de continuité d’activité des trésoreries à l’épreuve du Covid-19
Les plans de continuité d’activité ont pour objectif de répondre à trois risques opérationnels : celui lié à l’accès aux locaux, celui concernant l’utilisation des outils et systèmes informatiques et celui lié la gestion des équipes. La crise du Covid-19 crée un incident qui regroupe ces trois risques simultanément. Cet article propose d’étudier les bonnes pratiques à travers la méthode de construction d’un plan de continuité d’activité.
La trésorerie gère des échéances quotidiennes importantes avec la gestion des soldes et des paiements. Il s’agit donc d’un service dont l’activité doit être assurée, quelles que soient les circonstances. Les trésoreries ont donc pour mission de prévoir comment leur activité pourrait être impactée et, en regard, comment elle devrait alors être organisée. Malheureusement, cette mission est souvent négligée. Cet inventaire est appelé la préparation des « palliatifs conservatoires » dans le jargon de la méthodologie. Une réflexion profonde est menée pour identifier toutes les informations entrantes (prévisions, relevés de comptes, etc.) et sortantes (reportings, paiements, échanges avec les banques, etc.), tous les reportings utiles à l’activité (soldes, soldes prévisionnels, échéances de paiement, etc.), toutes les activités principales ou secondaires et leur mode de traitement, les compétences et les équipes nécessaires. Par exemple, cette réflexion peut remettre en cause la règle de séparation des tâches au sein du service entre le front-office, le back-office, la gestion des paiements et des équilibrages. Il faut envisager le maintien des canaux habituels ou le recours à des canaux de secours (les plateformes de banque à distance par exemple), la définition de l’équipe minimale pour la gestion de trésorerie, la restriction aux activités principales, les procédures de fonctionnement et celles d’échange d’informations. En matière d’équipement, le fait de doter systématiquement les équipes d’ordinateurs portables ces dernières années avec un logiciel de bureau distant réduit considérablement l’impact concernant l’environnement technique de travail, mais tout le monde n’en dispose pas. Il est à souhaiter qu’un minimum d’entités ait dû mettre en place des mesures de continuité d’activité à la hâte au mois de mars.
Toujours en amont d’un incident, une « cellule de crise » est à organiser. Cette cellule concerne une liste réduite de personnes, rassemblées dès la constatation d’un incident. Elle doit alors décider du déclenchement ou non du plan de continuité et en informer les équipes. Dans le cadre de l’annonce du confinement mi-mars 2020, le travail de la cellule de crise a été facilité : les trésoreries ont disposé d’un jour et demi pour mettre en place un travail à distance et communiquer avec leurs équipes et partenaires, conformément aux palliatifs conservatoires. Les services qui ont le mieux réagi sont ceux qui avaient formé leurs équipes au plan de continuité et leur avaient fourni toutes les informations nécessaires. La disponibilité des personnes ayant un pouvoir de signature est également à prévoir, ainsi que les outils nécessaires (utilisation des plateformes de banque à distance par exemple).
Pendant la crise, l’équipe de la trésorerie utilise les outils et moyens mis en place en amont et gère l’activité selon les « palliatifs de contournement », qui définissent les règles de fonctionnement pendant la crise. L’impact le plus fort concerne les échanges avec les autres services de l’entreprise, avec les banquiers, mais aussi et surtout au sein de l’équipe. Des outils comme Skype, Zoom, Teams, Tixeo, etc. pour les vidéo-conférences ou les échanges téléphoniques à plusieurs sont massivement utilisés actuellement. Le rapport au papier aura sans doute été modifié pendant le confinement, les « imprimeurs de masse » ne disposant pas des mêmes moyens. Les entreprises ont dû réfléchir au maintien ou non des ordres de virement sous forme papier, lorsqu’il en reste.
La crise du Covid-19 n’est pas terminée mais le déconfinement permet un retour partiel à un rythme normal d’activité. Enfin, c’est la cellule de crise qui définit qui, quand et comment le « retour à une activité normale » pourra se faire.
Rubrique Syrtals4Value
Adoption du digital pendant la crise : une tendance durable ou juste un effet COVID-19 ?
Cette crise semble remettre en question différents modèles à travers le monde qu’ils soient économiques, sociétaux ou comportementaux, et de nombreux observateurs s’accordent à dire que rien ne sera plus comme avant.
Nous voyons déjà se profiler les grands gagnants et les perdants de cette crise : ceux qui étaient préparés avec des processus, des organisations et des solutions technologiques, et ceux qui ne l’étaient pas tout en tentant de réagir de manière positive dans l’urgence. Mais il n’est pas trop tard pour agir et cette crise sanitaire va clairement engendrer l’accélération de la transformation digitale tant attendue.
QUELQUES CHANGEMENTS DE PROCESSUS ET TENDANCES
Qu’il s’agisse de l’organisation au travail en passant par les habitudes de consommation, nous allons observer quelques bouleversements évidents, mais qui n’avaient jamais réellement eu l’occasion de se manifester pleinement jusqu’à cette crise :
La digitalisation accélérée des entreprises
Cette crise sanitaire a catalysé le recours au digital dans l’ensemble des secteurs publics ou privés. Elle a au moins eu le bon effet de convaincre les esprits quant à la nécessité pressante d’une stratégie digitale. Toutes les entreprises qui étaient à la traîne devront désormais implémenter tout le panel d’outils numériques : solutions cloud, accès des outils à distance, partage des documents, conférence vidéo, sécurité des données et accès à l’information. Sans omettre l’obligation impérieuse des entreprises à équiper, former et accompagner leurs employés dans l’usage des outils digitaux.
Les solutions digitales ont pour certaines d’entre elles été mises en place dans l’urgence en mode « backup » et cela a malgré tout bien fonctionné, certes pas de manière la plus efficiente et fluide. Cependant les résultats probants constatés ne manqueront pas de convaincre. Nous constatons à quel point et surtout à quelle vitesse les habituels freins (exceptions, budgets, doutes, reports, etc.) à la transformation digitale ont subitement disparu. Quand l’essentiel est en jeu, les réticences et objections disparaissent subitement !
Le télétravail gagne en crédibilité
Anecdotique avant la crise, le télétravail s’est généralisé en quelques jours dès que la pandémie a contraint le Gouvernement à confiner le pays. Le manque de confiance dans l’autonomie des collaborateurs a été remplacé au pied levé par la responsabilisation de chacun dans des secteurs à forts enjeux (banque, assurance, comptabilité, santé, éducation). Nous sommes convaincus que beaucoup d’entreprises, de toute taille, accepteront le fait que le travail à distance n’est pas aussi préjudiciable. En revanche, les entreprises doivent à présent sortir du mode télétravail backup et s’organiser pour en faire un mode de travail nominal en prenant en compte les avantages constatés (moins de voyages, moins de stress, moins d’embouteillages, plus de temps opérationnel) sans oublier de prendre en compte les limites/contraintes (bande passante au domicile, organisation famille, sécurité d’accès, etc.). Il est clair que les nouveaux modes de travail ne seront ni à 100 % en télétravail ni à plein temps au bureau. Les processus de fonctionnement à distance et sur site devront être revus en fonction de la faisabilité, de la sécurité et de la nécessité de la présence physique.
Logistique & Supply Chain
Une nouvelle stratégie relative aux chaînes d’approvisionnement et la capacité à les monitorer de manière précise et sécurisée sont clairement une évidence avec une nécessité de repenser le modèle de fonctionnement de bout en bout. L’arrêt par exemple de l’industrie chinoise a démontré la dépendance marquée de l’Europe à son égard. Nous sommes convaincus que les entreprises et les collectivités pourraient ainsi remettre à plat leurs processus de production et de logistique en utilisant au maximum le digital au travers de l’intelligence artificielle, l’internet des objets, la robotique, la blockchain pour produire localement, (c’est-à-dire aussi au niveau régional européen), tout en garantissant un haut niveau de qualité, de sécurité à un tarif compétitif.
Digitalisation du commerce de proximité
Il paraît évident que le commerce global va changer après cette crise et que le commerce en ligne va encore s’accélérer, notamment dans certains secteurs où il n’est pas encore la norme. Mais surtout, cette expérience met en lumière beaucoup de questions pour les plus petites enseignes (maintien de la relation client, vente sans flux physique, fidélité…). Cette période a en revanche clairement montré que le multicanal est globalement resté un vœu pieux pour beaucoup d’entreprises. Quelques magasins ou enseignes ont pu tirer leur épingle du jeu grâce à leur stratégie de vente multicanal offrant ainsi à leurs clients une expérience se révélant quasi unique durant cette période de confinement. Toutefois, les commerçants, notamment les plus petits, accéléreront leur transition numérique : réseaux sociaux, site web, plateformes de commerce, e-marketing afin de pouvoir offrir une véritable expérience multicanal en mode nominal.
Virtualisation des événements : un phénomène permanent en vue
Webinars, conférences en ligne, live streaming sur les réseaux sociaux, cours en ligne… Aujourd’hui l’offre s’est démultipliée (yoga, art, musées) mais aussi de nouveaux formats d’évènements, comme le cloud-clubbing, le concert d’opéras pour n’en citer que certains. Ces changements qui touchent la sphère privée vont également impacter la sphère professionnelle. La majorité des grands évènements business ont tous été annulés et pour certains reportés ultérieurement. Il est certain que ces grands événements seront repensés pour s’adapter grâce aux technologies déjà disponibles (IA, réalité virtuelle) afin de créer et personnaliser des destinations de conférence en ligne pour accueillir leurs invités et leur offrir une expérience de networking unique.
Les mesures de confinement ont constitué une aubaine pour l’économie numérique. Les plateformes de e-commerce, de télétravail, d’enseignement à distance ou encore de jeux vidéo ont montré toute leur utilité même auprès des plus réticents. Les GAFAM, en particulier, se sont installés encore plus significativement dans nos vies et celles des enseignes.
Tout le monde essaie d’imaginer à quoi va rassembler notre vie suite à cet arrêt momentané de l’économie mondiale. Certains pensent que nous oublierons vite cette crise et reviendrons à nos habitudes du passé, d’autres assurent que nous allons créer une nouvelle normalité.
Une chose est sûre, la distanciation physique va fortement imprégner notre mode de vie et stimuler le potentiel et la créativité du monde digital.
Cette crise engendrera des mutations structurelles qui développeront de nouvelles activités. Il est évident que nombre d’acteurs tous secteurs confondus sauront trouver dans cette crise des leviers de croissance et d’opportunités tandis que d’autres souffriront de leur incapacité, leur inaptitude ou leur impossibilité à évoluer dans un monde où la transition numérique s’accélère et où se retrouver digitalement distanciés sera un réel handicap de développement.
Rubrique Syrtals-Cards
Entre évolutions naturelles et accélérations, en France et à l’étranger
En juin 2019, nous avions réalisé un premier Opus dédié aux wallets et aux paiements mobiles (nous invitons celles et ceux qui ne l’auraient pas lu à le télécharger sur notre site www.syrtals-cards.com). Nous venons de finaliser le second Opus dans un contexte bien singulier et différent du précédent. En effet, les épreuves subies collectivement depuis 3 mois riment avec changement ou ajustement de nos habitudes et comportements. Il en va notamment de nos façons de travailler, voyager, acheter, consommer… et de payer. Ainsi, le mode de paiement sans contact n’a jamais si bien porté son nom et ses vertus sont acclamées aux 4 coins de la planète.
Depuis 12 mois, même si avec des rythmes distincts, le recours au paiement par smartphone et aux wallets digitaux ne cesse d’augmenter. Pour en avoir un réel aperçu, nous parcourons plusieurs géographies (Chine, Asie du Sud-Est, Afrique, Etats-Unis, Amérique latine, Europe…) et passons en revue de multiples acteurs en lice (banques, coalitions, géants du web, start-up, fabricants de téléphones, opérateurs télécom, retailers, cards schemes…).
Ainsi, l’occasion nous est donnée de décrypter les rouages et la diversité du paiement digital (paiement de proximité, online, PtoP jusqu’à des super-apps ; NFC vs QR Code ; instant payment vs carte…), d’analyser les stratégies et les parcours des différents protagonistes, de recenser des innovations ou inflexions notables, d’expliciter les raisons des succès ou des échecs, d’esquisser des scenarii pour demain…
Les résultats de nos recherches et analyses confirment à nouveau la lame de fond qui porte depuis des années le paiement digital dans les pays émergents et semi-développés alors que les pays matures font montre d’un bilan plus contrasté, entre les bons élèves et les moins bien lotis pour lesquels la cohabitation entre nouveaux modes de paiement et ceux bien ancrés dans nos habitudes, fait encore loi.
Nous portons également notre attention sur un certain nombre d’enjeux en filigrane de ces évolutions qui deviennent de plus en plus cruciaux, surtout à l’aune de la digitalisation et de la globalisation accrues : risques d’intermédiation et de perte de revenus ; montée en puissance d’acteurs internationaux dotés de moyens colossaux ; irruption des e-monnaies ; quid de l’avenir de l’Europe des paiements ; poids relatifs des intervenants historiques en baisse ; initiatives collégiales vs en solo…
La crise sanitaire qui devrait rester longtemps dans nos mémoires, a impulsé de nouveaux réflexes et des prises de conscience multiples : achats plus ciblés et locaux ; déplacements dosés ; accélération des services à distance (santé, travail, éducation, loisirs…) ; appétence indiscutable pour le e-commerce et la livraison à domicile ; recherche de praticité, sécurité et transparence dans nos actes de paiement.
Dès lors, assisterons-nous à un engouement durable vers les paiements digitaux qui pourront s’installer définitivement dans nos paysages ?
La lutte en tout cas restera acharnée pour s’octroyer une place dans cette arène et nous serons ravis d’échanger sur les multiples soubresauts de cette saga mondiale….
Dossier – Interview de Marc ESPAGNON
- Comment vous êtes-vous adapté à cette crise ? A-t-elle été anticipée au sein de BNP Paribas ?
Pour ses activités centrales, BNP Paribas Cash Management avait mis en place un jour de télétravail par semaine pour une large part de ses collaborateurs. Nous étions habitués au mode de fonctionnement du travail à distance, opérationnel depuis plus de trois ans. Dans le contexte de la crise, il a fallu étendre le nombre de jours de télétravail. Les capacités informatiques ont dû être renforcées de manière conséquente. Le challenge a été d’augmenter le nombre de collaborateurs utilisant simultanément le télétravail. En somme de passer d’environ 20 % des effectifs en télétravail à un instant « t », à l’ensemble des équipes. Les équipes informatiques ont dû dans l’urgence multiplier la bande passante pour donner accès à l’ensemble des postes nomades déjà existants.
Pour ce qui est du back-office et des centres d’affaires en revanche, le télétravail était une pratique peu répandue. Pour faire face aux contraintes de la crise sanitaire, les solutions de travail à distance ont été déployées y compris pour des fonctions opérationnelles. Cette organisation a permis de garantir la bonne continuité opérationnelle des activités avec une répartition optimisée du travail à distance et de la présence physique. Le risque sanitaire a pu être minimisé en limitant au strict minimum le nombre de collaborateurs présent dans les locaux.
Globalement, le télétravail s’est mis en place de manière fluide et rapide, tout en gardant la priorité donnée à l’écoulement des flux quotidiens d’opérations et des services de la banque
- En collaboration avec Syrtals, BNP Paribas travaille depuis longtemps à la dématérialisation de ses services de cash management. Pensez-vous qu’il s’agit d’un secteur plus adapté au télétravail ?
La dématérialisation était, bien avant la crise, une tendance majeure. Le confinement et la généralisation du travail à distance ont accéléré encore plus cette demande, mais aussi mis en lumière de nouveaux challenges auxquels les activités de cash management doivent apporter une réponse.
Si les instructions de paiement sont depuis longtemps dématérialisées, à l’exception de quelques opérations spécifiques comme les chèques et les quelques ordres de virement encore manuels, la crise a fait ressortir le besoin d’étendre la dématérialisation à tous les autres échanges qui existent entre la banque et ses clients.
Ainsi, pendant les premiers jours du confinement s’est posée la question de la capacité de toutes les entreprises à pouvoir signer et transmettre leurs instructions.
Instructions liées aux ordres de paiements non dématérialisés d’abord. Sur ce point, force est de constater que la mise en place du télétravail et des plans de continuité d’activité a été très efficace chez nos clients, et que les flux se sont écoulés sans incident.
La deuxième inconnue résidait dans la transmission des autres instructions, notamment liées aux contrats et ouvertures de compte et des contrôles de signature à effectuer. Dans ce cas, inutile de préciser que le télétravail complique sérieusement la donne… Nous avons donc été amenés à mettre en place de manière ad hoc des processus de signature électronique et trouver les solutions au challenge sécuritaire qui en découle.
Au-delà de la gestion de l’urgence de la période de crise sanitaire, nous avons lancé les développements pour mettre en place une infrastructure plus industrielle de gestion de la signature électronique, couvrant tous nos métiers. C’est quelque chose qui était dans nos projets, mais que la crise a conduit à accélérer.
- Peut-on conclure que cette crise a joué un rôle d’accélérateur du processus de dématérialisation que vous aviez déjà entrepris ? Si oui, quelles sont les perspectives d’avenir pour le télétravail et le cash management ?
Du point de vue du cash management, la crise n’aura pas affecté la tendance actuelle qui est à la dématérialisation. Elle aura cependant enrichi notre vision et fait émerger de nouvelles demandes, auxquelles nous devrons apporter des solutions. Par exemple, il nous faut bien sécuriser les opérations par mail/PDF qui sont des procédures sensibles, aussi bien pour l’entreprise cliente que pour nous.
Au niveau du télétravail et de l’organisation de l’entreprise, cette crise nous aura permis de revoir nos PCA (plans de continuité d’activité). À l’origine, ils avaient été pensés autour de la bascule d’un site principal vers un site de secours, mais jamais en intégrant l’obligation que tous les collaborateurs travaillent depuis chez eux. L’après-crise sera donc l’occasion de repenser la fonction du bureau, lieu de travail, mais aussi lien social. Pourquoi est-il nécessaire de travailler dans un lieu commun ; que peut-on accomplir au bureau qu’il n’est pas possible de faire en télétravail ?
En tout état de cause durant toute la période pendant laquelle le virus continuera de circuler, nous poursuivrons un arbitrage prudent entre retour au bureau et protection de nos collaborateurs. À plus long terme, on peut parier que l’utilisation du travail à distance sera encore plus large.
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